J'aimerais ne jamais plus avoir à me souvenir de cette époque difficile où tout ce que l'on pouvait encore faire, c'était de prier chaque jour pour avoir un lendemain supplémentaire. Et encore, c'était au début, lorsque l'on avait pas encore compris que ce qu'il y aurait de mieux pour nous, c'est que l'on mette fin à nos souffrances sur Terre. Les maladies, la famine, l'air irrespirable et ces contrôles à chaque coins de rues.. ce n'était une vie pour personne. J'ai vu le jour en 2133 quelque part en Amérique. Le nom de la ville, peu m'importait de le connaître : pour moi, tout les endroits se ressemblaient et je les détestais tous autant qu'ils étaient. Je rêvais tout simplement de la vie qu'ils avaient dans leur monde, les personnages des livres que maman me lisait avant que je ne m'endorme le soir, espérant avoir assez d'air pour ne pas suffoquer durant la nuit. Ils avaient l'air heureux eux au moins. Comme tout les enfants, j'ai vécu les premières années de ma vie sans savoir ce que j'en ferais, sans même y réfléchir puisque de toute façon, l'avenir n'existait pas. Je me souviens encore très distinctement de la femme que mes parents me décrivaient, je me l'imaginais belle et forte, le genre à ne pas se laisser abattre et prête à défendre tout ce en quoi elle croyait coûte que coûte. Ils l'appelaient communément Alicia, ma demie-sœur partie défendre son pays au prix de sa vie s'il le fallait. C'est l'année de mes cinq ans que je pu enfin rencontrer cette inconnue dont on me parlait tant. Enfin, inconnue.. Lorsque je l'ai vue pour la première fois, elle était encore mieux que tout ce que j'avais pu m'imaginer et, sans savoir pourquoi, je ne pouvais cesser de l'admirer secrètement même lorsqu'elle été allongée là, ses graves blessures ayant eu raison de sa mission en Somalie. A son réveil, nous avons passé beaucoup de temps ensemble et en très peu de temps, c'était comme si je l'avais toujours connue. Elle était ma sœur, ma meilleure amie, mon mentor et un exemple à suivre plus que tout. Je voulais pouvoir déclencher ces étoiles dans les yeux de notre mère comme lorsqu'elle parlait de Alicia et je voulais les rendre fiers de moi, autant mes parents que le soldat qu'était ma sœur.

Nous ne nous sommes pas quittées durant des mois jusqu'à ce qu'Alicia soit rappelée pour partir en mission. Dès les premiers jours sans elle, je sentais qu'elle me manquait déjà et j’espérais au plus profond de moi de la voir franchir le seuil de la porte en disant qu'elle était de retour car sa mission avait été annulée ou pour je ne sais quelle raison tant qu'elle était là. En l'attendant, je me contentais me m'imaginer entrain de combattre les méchants comme elle le faisait : je voulais lui ressembler en tout point, être aussi forte et déterminée qu'elle. Mais j'étais très loin de l'être à cette époque quand un policier est venu me chercher à la maison pour m'emmener chez des amis de la famille. Il n'avait pas pris de pincettes pour m'annoncer la terrible nouvelle de la mort de mes parents mais je n'avais pour autant pas pleuré sur le coup. Le gouvernement a fait rapatrié Alicia et c'est au moment où je fonçais dans ses bras que les larmes se sont mises à couler d'elles même. J'ai longtemps pleuré dans ses bras mais elle était là à chaque instants, ne me lâchant pas dans ce moment difficile alors qu'elle aurait pu le faire comme beaucoup l'auraient fait. Cet incident m'a attachée encore plus à elle et ma garde lui fut accordée quelques jours plus tard. Nous avons emménagé ensemble et Alicia a réduit ses missions afin de pouvoir s'occuper de moi. Je ne lui en serais jamais assez reconnaissante surtout quand je voyais dans son regard la soif d'aventure qui la tiraillait.

J'avais à peine neuf ans lorsque j'ai entendu parler pour la première fois de Terra Nova. On venait alors d'y envoyer un homme, le commandant Kordsmeier, avec qui ma sœur avait déjà travaillé auparavant. Dans ma tête, je me demandais comment cela pouvait bien être de l'autre côté, ce ne pouvait pas être pire qu'ici en tout les cas, j'en avais la certitude. Les mois ont passé mais la qualité de vie n'a pas été en s'améliorant. Que pouvait-on améliorer sans aucunes ressources de toute façon ? Quoi qu'il en soit, Août 2142 arrivait à grands pas et avec lui le second pèlerinage qui allait changer notre vie, à Alicia et moi. Elle avait été choisie par le commandant Kordsmeier pour le seconder et nous allions donc traverser le portail qui nous mènerait vers une vie meilleure, une vie que j'apprécierais, je le savais au plus profond de moi.. Quelques semaines plus tard, la ville délabrée et l'air irrespirable dans lequel je vivais depuis neuf ans fit place à la jungle que je ne connaissais nulle part ailleurs que dans les livres : il était temps pour moi de montrer ce dont j'étais capable. Les soldats m'ont tout de suite appréciée, seule enfant parmi toutes ces grandes personnes, je ressemblais un peu à une mascotte pour eux et ce n'était pas pour me déplaire. On m'a appris à me débrouiller seule, à survivre dans ce nouveau monde qui était le mien à présent. Le temps pour les rares élus d'établir la colonie, je m'amusais comme je le pouvais dans ce vaste endroit qui est très vite devenu mon terrain de jeu. Les recoins de Terra Nova n'avaient plus de secrets pour moi et je savais que cela me serait utile un jour ou l'autre. En attendant, je me contentais d'observer les animaux censés être disparus depuis bien longtemps, aimant regarder leur comportement quand je m'ennuyais de la compagnie d'enfants de mon âge. Plus vite que je ne l’eus pensé, la colonie fut mise sur pied et d'autres pèlerinages vinrent grossir nos rangs. La vie était plus paisible que jamais jusqu'à l'arrivée des classes six.. Mais j'avoue ne pas avoir tellement envie parler d'eux car aujourd'hui, le jour de mes seize ans est arrivé et avec lui, le début de mon stage militaire.